The Marshals parlent de la vraie vie, de ces campagnes abandonnées, de ces petites villes françaises, et qui ont toutes le blues. Le trio fait résonner la musique avec une intensité magistrale, mettant en relation le Delta du Mississippi et le Massif central. The Marshals délivre un blues ouvrier, laborieux, inspiré de celui de John Lee Hooker ou de Canned Heat.
Les Marshals portent en eux le souffle épique du blues qui tape au cœur, au plus près de la vie des petites gens. Ils sont un groupe sincère. Ils sont sans doute la meilleure bande-son des temps à venir.
Moulins, dans l’Allier. Le poids d’un monde perdu. La fameuse Diagonale du Vide qui fait tant ricaner le citadin connecté se ressent dans les tripes. On aime ces terres autant qu’on les déteste, ne vivant que par les souvenirs des vieux, entre industries locales désormais révolues et paysannerie. Personne ne veut connaître ces territoires. Ils sont pourtant, pour celui qui veut le voir, encore emplis de la chaleur humaine des hommes qui connaissent la dureté des temps. Ils sont une mythologie, comme le sont les États du Sud-Américain, le Michigan, ou le Texas. Appréhender les Marshals avec une image d’Épinal faite de cow-boys poussiéreux ou de vieux noirs jouant du Dobro sur un pas de porte est se tromper sur leur identité réelle.
The Marshals n’ont jamais lâché un idiome précieux : le blues dans son essence, qu’il soit de Moulins ou de Jacksonville. Laurent Siguret à l’harmonica, Thomas Duchézeau à la batterie, Julien Robalo à la guitare et au chant, sont désormais des légendes du blues hexagonal. Car le vent qui souffle dans la musique de The Marshals est celui de l’Allier, du Massif central, tous ces territoires d’oubliés. Mais leur aridité est celle du Blues du Delta. Ils l’ont pris, ils l’ont pétri, et en ont fait leur. Les suivant avec passion depuis presque dix ans, je refuse obstinément de les comparer aux Black Keys, même à leurs fantastiques débuts. Leur identité rustique est plus puissante. On est loin des interprétations ampoulées à base de sections de cuivres et de choristes gospel. Oui, la France dispose d’un trio de blues-rock incroyablement authentique, et il n’a aucun rapport avec un fantasme caricatural de Blues de Chicago.
The Marshals parlent de la vraie vie, de ces campagnes abandonnées, de ces petites villes françaises, et qui ont toutes le blues. Le trio fait résonner la musique avec une intensité magistrale, mettant en relation le Delta du Mississippi et le Massif central. The Marshals délivre un blues ouvrier, laborieux, inspiré de celui de John Lee Hooker ou de Canned Heat.
Après Les Courriers et Les Bruyères, le site choisi pour cette nouvelle session est Le P’tit Cham, non loin du Sancy, dans le Parc des Volcans d’Auvergne. The Marshals se sont à nouveau connectés à la terre et se sont coupés du monde. Ils ont à nouveau labouré leur blues dans la roche granitique. De petits éclats tranchants sont tombés de la montagne, formant neuf morceaux grondants, faits pour la route, pour ces longues heures où le cerveau se perd dans les paysages, où le souffle des éléments, entre beauté naturelle et solitude campagnarde, s’entrechoque avec la mélancolie des temps qui filent.
Dans leurs textes, il est question de sorcellerie, d’oiseaux de nuit, des éléments, de la lumière qui apparaît après le désastre, d’une nouvelle aube. Les Marshals portent en eux le souffle épique du blues qui tape au cœur, au plus près de la vie des petites gens. Ils sont un groupe sincère. Ils sont sans doute la meilleure bande-son des temps à venir.
Julien Deléglise.